2011 & 2014
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COMMANDE EN LIBRAIRIE
Thebookedition
ISBN : 979-10-95146-02-5
« [...]   Juillet arrive quand même, cette année. Nous sommes fatigués d’autant de travail et de préoccupations. Roger est euphorique de retrouver ses enfants dans ce cadre tant aimé. Au long de la saison, il peut à peine les rencontrer, n’ayant qu’un planning élastique et imprévisible. Il les voit chaque jour à la Mercurie, peut les embrasser, les chouchouter, faire des exceptions pour les accepter dans des moments et des lieux interdits aux profanes. Thomas a dix ans et milite en tout pour son papa. C’en est presque une dévotion de ces deux-là l’un pour l’autre. Bien sûr, je suis aussi comédien, et mon filleul admiratif ne conçoit nul autre avenir que le théâtre, plaisante son père :
   - De toute façon, La Grande Courtine tu vas pas la jeter. Alors je serai directeur, metteur en scène et comédien.
     - Attends un peu que je sois une vieille baderne à la retraite !
     - Si tu veux je t’engage. Tu ne joues pas trop mal… je te donnerai des cours.
   C’est un prétexte à chahut et chatouilles, qui se renouvelle aussi souvent que possible. Avec ses sept ans, Angélique est plus sérieuse, prend volontiers la pose des personnages interprétés devant elle. Elle préfère les câlins aux chahuts de garçons.
     - Dis parrain, pourquoi la comtesse elle a la tête levée comme ça ?
     Elle me fait sa comtesse, je lui réponds comme le marquis
   - Parce que c’est une grande dame qui a beaucoup d’éducation. Lisette, c’est sa servante et elle n’est pas allée à l’école.
     Elle répète ce que je viens de dire, en accentuant chaque intonation et se rengorgeant ; nous partons d’un éclat de rire. Je la prends dans mes bras pour faire quelques tours de danse.
     - Tu m’apprendras à danser la valse ?
     - Quand vous voulez, madame la comtesse.
   Et nous repartons dans une valse virevoltante… pour nous écraser dans l’herbe. J’adore ma famille : Elodie, Edwige, Roger, Françoise, Thomas, Angélique.
     Ah ! Cette année, nous avons monté une cabale contre le discours d’accueil de notre directeur d’acteurs ; Agnès et les enfants sont de mèche. Il demande le silence, je donne le signal quand il va prendre la parole. Tous ensemble, nous prononçons le rituel, devant le visage ébahi et heureux du maître :
     - Je ne vous cacherai pas que mon choix d’une pièce du dix-huitième siècle est, en ces lieux, totalement et subjectivement égocentrique…
     Il éclate de rire, élabore une grimace clownesque, attend la suite, que nous entonnons aussitôt :
   - Cette année, nous étudierons un auteur cher à mon cœur, et ses « Fausses Confidences ».
    - Raté !! ce ne sera pas Marivaux, cette fois, mais bien une pièce du dix-huitième siècle.
      Il ne va pas s’en tirer à si bon compte, car nous savons notre rôle au rasoir : [...]  »
Thebookedition
ISBN : 978-2-9544472-5-4
280 pages - Prix : 14 €
 
 
     Quel monde étrange que celui de Roger Vidal, grand metteur en scène parisien que chacun connaît !
   Chaque été, il transporte son théâtre dans sa maison normande, héritage d’un bien curieux ancêtre du 18e siècle. Le portrait de ce personnage est comme vivant, puisqu’il lui parle…
  Après dix huit ans de questions mille fois retournées, son fils spirituel, Stéphane Bellini, parle enfin des évènements inquiétants qui tourmentèrent son maître et ami Roger Vidal.
    Que s’est-il passé dans ce monde clos ?
 
   Les gens connus écrivent tous, même quand ils n’ont rien à dire, la célébrité fait vendre. Ne se sentant pas capable d’écrire d’une manière compréhensible par tous, Stéphane Bellini a demandé à André Gobry de porter sa parole. Car il ne tient plus, toutes ces longues années l’ont miné, ont miné ses compagnons de théâtre. Il ne peut garder plus longtemps le silence.
 
    Roger Vidal entraîne dans son destin tous ceux qui l’entourent, ceux qu’il couvre de son aile protectrice. Paternaliste, aimant, aimé, il régit son petit monde comme un merveilleux metteur en scène. Merveilleux, oui, c’est cela ! Mais d’aucuns disent que… Il ne faut pas croire les superstitieux ni les semeurs de mythes ! 
 
« [...] Pendant ce temps je pêche au gros. Pour tout dire, je somnole depuis vingt minutes sous le chêne de Morgane, ne sachant même pas si elle apparaît d’habitude à cette heure dans notre monde. Je sursaute comme un damné quand je la surprends, assise à mon côté.
     - Ah ! … Heu… je t’attendais…
     - Oui.
     - Je voulais te parler…
     - Oui.
     - Tu ne m’aimes pas beaucoup, hein ?
     - Pourquoi pas ? Tu crois trop savoir.
     - Ben non, justement. J’ai besoin de toi pour comprendre…
     - Tu ne pourras pas comprendre.
     Je me lève soudain, une fois de plus excédé par cette arrogance,
     - Tu ne peux pas arrêter ton petit jeu !
     Elle rit pour attiser mon instabilité,
     - Tu vois !
     - Allez ! s’il te plaît, Morgane… Parle-moi de l’ancêtre de Roger.
     C’est elle qui se lève violemment, s’éloigne de moi, comme effrayée,
     - Ah ! sûrement pas !!
    Je suis abasourdi. Donc, elle aurait peur. Morgane aurait peur de quelque chose, en l’occurrence d’un type mort depuis longtemps. [...] »
 
  
Roman d'André Gobry
Une ombre au tableau